Coronavirus : le dépistage, le combat difficile des Casablancais
À l'heure où le coronavirus continue de gagner du terrain au Maroc, Allodocteurs Africa a essayé de se faire dépister dans un hôpital public et un laboratoire privé. Retour sur une journée pas comme les autres.
On ne badine pas avec le dépistage du coronavirus ! Depuis juin dernier, les autorités marocaines réalisent, chaque jour, autour de 20.000 tests. Alors que le royaume a prolongé l'état d'urgence et qu'il espère lancer sa campagne de vaccination avant la fin d'année, une journaliste d'AlloDocteurs Africa a essayé de se faire dépister à Casablanca. Une ville où les laboratoires croulent sous les demandes, et les délais pour obtenir un rendez-vous ne cessent de s'allonger.
À ce jour, le meilleur moyen de se faire dépister est le test basé sur la technique PCR. C’est un test qui se fait grâce à un prélèvement par voie nasale avec un gros coton-tige, qu'on appelle écouvillon. Son gros avantage est qu’il est très fiable, puisqu’il détecte le matériel génétique du virus qui s’appelle aussi ARN. Pour réaliser ce type de test, il faut se diriger vers l'hôpital public ou prendre un rendez-vous dans un laboratoire privé ou affilié à l'entreprise.
Votre passeport, s'il vous plaît !
À Casablanca, l'Institut Pasteur mène, depuis le début de la pandémie, les analyses de dépistage dans son laboratoire de référence pour les virus émergents et dangereux, à raison de quelque 2.000 tests par jour. Pour en savoir plus, on a décidé de nous déplacer à l'Institut. À sa porte, un agent de sécurité nous demande de nous arrêter, tout en réclamant notre passeport. Oui, c’est bien un passeport qui est demandé à la porte de cet établissement public.
Pour avoir accès aux tests PCR de l'Institut Pasteur, il faut donc être muni d’un billet d’avion et d’un passeport en cours de validité. Toujours selon l'agent de sécurité, les personnes qui ont peur d'avoir contracté le Covid doivent plutôt se rendre à l’hôpital Moulay Youssef ou celui de leur lieu de résidence. Mais sur place, les files d'attente sont imposantes. Pour éviter d’attendre pendant des heures, l’agent de sécurité a une solution toute trouvée : "Je peux te donner un numéro de téléphone d’une personne affiliée au ministère de la Santé. Dis-lui que tu viens de ma part, et il te fera passer avant tout le monde". Mais chez Allodocteurs Africa, nous n’aimons pas la facilité....
Direction l’hôpital Cheikh Khalifa
Au lieu de contacter la personne recommandée par l'agent de sécurité, on s'est plutôt dirigés vers l'hôpital Cheikh Khalifa Ibn Zaid, le plus grand établissement hospitalier privé au royaume. Etant situé en périphérie, ce dernier devrait logiquement attirer moins de monde. Que nenni. A notre arrivée, à 8h du matin, nous étions déjà les 483ème sur la "liste". Selon les dires de l’infirmière, seules les 83 premières personnes inscrites sur la liste ont pu être testées.
Face à notre désarroi, un agent de sécurité (encore un) nous conseille de revenir "vers 11h". Chose qu'on a fini par accepter, presque à contre gré. Mais 3 heures plus tard, à peine 50 personnes avaient été testées. ¨Pourtant, les dispositifs sont bien là : une quinzaine de box étaient installés pour accueillir les citoyens, tout en respectant les gestes barrières. Seulement voilà : le système informatique ne marchait plus. Autrement dit, les médecins et infirmiers n'avaient aucun moyen d'inscrire les nouveaux testés. Et il fallait tout bonnement attendre.
Vers le coup de 13h, les agents de sécurité ont été chargés d'expliquer aux personnes présentes qu’il fallait revenir le lendemain, vu que le sytème informatique était en panne. Une nouvelle qui a rapidement fait réagir la foule. Désemparés, mécontents ou tout simplement impatients, les patients ont rapidement formé un cercle autour du seul médecin présent au moment de l'annonce. À tel point que les règles de distanciation physique n'étaient plus respectées...
Et les laboratoires d'analyses ?
C’est donc la mine sombre que nous nous sommes dirigés, à nouveau, vers le centre du poumon économique du royaume, à la recherche d’un laboratoire privé. Cette fois-ci, nous avons hérité du numéro 192... une centaine de personnes faisaient la queue devant le laboratoire.
Alors qu'on patientait, un jeune homme se faufile dans la foule pour expliquer qu'il aurait été plus intéressant de se faire dépister dans un laboratoire situé au quartier Maârif car les résultats y seraient plus rapides. Si cet énième conseil sonnait faux à nos oreilles, notre patience avait aussi des limites. Au bout d'une heure d'attente, on a décidé de nous rendre au Maârif pour tenter notre chance. Jusqu'au bout.
Finalement, ce petit laboratoire nous a rapidement accueilli. En moins de quinze minutes, notre test de dépistage a été fait. Les résultats (négatifs) nous ont même été envoyés par mail. Mais si nous avions été positif au coronavirus, nous aurions pu contaminer des centaines de personnes ! Dans ce contexte de crise sanitaire, il est aberrant de devoir se déplacer dans les quatre coins de Casablanca pour avoir accès à un test PCR. Tout comme il est regrettable que les 700 dirhams payés pour notre test au laboratoire du quartier Maârif soient non-remboursables. Car au Maroc, seules les personnes testées positives sont remboursées. Mais ça, c'est une autre histoire...