Guinée : les ravages du cocktail Tramadol-Café
En région forestière, 60% de jeunes consomment du café noir dans des kiosques qui proposent d'y ajouter l'antalgique Tramadol, bien souvent en surdosage. Le Dr Mamadi Conde souligne les dangers causés par cet antalgique au niveau de la jeunesse.
"Café-Tramadol", pour beaucoup de jeunes en Guinée forestière, c'est un rituel. D'autant plus accessible que le café, comme le médicament, sont fournis en toute simplicité par les kiosques où aime se retrouver la jeunesse. Cette diffusion croissante en Afrique à travers les "pharmacies par terre" inquiète les autorités de santé. Allodocteurs.Africa, fait le point avec un acteur de terrain, le Docteur Mamadi Condé.
Allodocteurs.Africa : Quelle lecture faites vous aujourd'hui de l'utilisation non médicale ou du surdosage du tramadol dans les cafés noirs ?
Dr Mamadi Conde, médecin responsable de centre psychiatrique : C'est un antalgique qui aide beaucoup dans la prise en charge des douleurs intenses que les autres antalgiques n'arrive pas à soulager. Mais l'utilisation non médicale est aujourd'hui fréquente chez les jeunes. C'est même le cas de 60% de la population forestière.
Allodocteurs.Africa : Pourquoi mettre la dose dans le café noir ?
Dr. M. C : Pendant la saison pluvieuse, la plupart des jeunes passent leur temps dans les cafés, bars et kiosques. Et aujourd'hui, le Tramadol est devenu une substance qui est utilisée partout. Les revendeurs en tirent beaucoup d'intérêt parce que le trafic est facile et ce sont les gérant des bars qui achètent les doses ! Les consommateurs se les procurent directement auprès d'eux. 100 à 200mg sont utilisés dans le café ou même le Lipton.
Allodocteurs.Africa : Quel est son impact au niveau de la population ?
Dr. M. C : Cela un impact négatif sur la santé de la population, surtout au niveau de la jeunesse. On ne pourra pas tout citer parce que, dès que la dose atteint le seuil d'excitation, cela peut déranger toute "la chimie du cerveau". On peut alors tomber dans les troubles mentaux. Dans notre centre de psychiatrie, beaucoup de jeunes viennent avec un tableau de trouble mental sévère, de manie...
Allodocteurs.Africa : Quels sont les troubles les plus fréquents ?
Dr. M. C : Le plus souvent, après nos consultations et examens, l'accès maniaque, la manie, est le plus détecté. Cela peut commencer par une simple dépression. Pour soulager leur dépression, ils prennent beaucoup de Tramadol. L'euphorie s'en suit. Les jeunes sont ensuite comme enchaînés à cause de cette consommation des substances psychoactives.
Allodocteurs.Africa : Que faut-il faire pour freiner ce fléau ?
Dr. M. C : Il faut une sensibilisation. Aujourd'hui, beaucoup de personnes trafiquent le Tramadol du Liberia, de la Sierra Leone vers la Guinée... La sécurité doit donc se mêler à la lutte. Notre devoir d'agents de santé, c'est de faire une psychoterapie cognitivo-comportementale de s'engueuler la jeunesse ! C'est à dire sensibiliser les personnes qui tombent malades après avoir pris ces boissons sur les conséquences de la consommation abusive de cette substance.
Allodocteurs.Africa : Des ravages qui cont au-delà des consommateurs de la drogue
Dr. M. C : Oui, accidents de circulation, les cas de viol sont entre autre des fléaux dont sont victimes des innocents grâce à la consommation de cette substance appelée Tramadol par les jeunes.