"Les médicaments vendus dans la rue sont un obstacle à la lutte contre le paludisme"
Alors que l'Afrique assiste au déploiement timide du RTS,S, le premier vaccin recommandé contre le paludisme chez les enfants, la Professeure Francine Ntoumi, spécialiste de la malaria, revient sur les derniers développements.
Le paludisme reste un problème majeur de santé publique et de développement en Afrique. Au cours de l’année dernière, environ 95 % des 228 millions de cas estimés ont été détectés sur le continent, alors que la maladie a tué environ 600.000 personnes. Heureusement, des succès importants ont aussi été enregistrés. Des recommandations historiques sur l’utilisation du premier vaccin antipaludique RTS,S ont été publiées par l’Organisation mondiale de la Santé en fin d’année dernière. Ce vaccin sera utilisé pour prévenir le paludisme chez les enfants âgés de six mois à cinq ans et vivant dans des milieux où la transmission est modérée à forte.
Mais alors que cette nouvelle piqûre tarde à être déployée dans les pays d'Afrique subsaharienne durement touchés par le paludisme, un nouveau vaccin nommé R21 affiche des résultats très prometteurs. En attendant les essais cliniques de phase 3, de nombreux scientifiques africains sont en quête de nouvelles armes contre cette terrible maladie. Certains d'entre eux contribuent directement au développement de vaccins. C'est notamment le cas du centre de recherches médicales de Lambaréné (CERMEL) au Gabon, qui a participé aux essais cliniques de RTS,S (pour l’Afrique centrale)
"Le Burkina Faso a une expertise reconnue dans les essais cliniques et les différents groupes participent aux essais cliniques d’autres candidats vaccins. C’est important de souligner cela car beaucoup pensent que les chercheurs africains sont juste des observateurs", explique la Pre Francine Ntoumi, parasitologue et première femme africaine responsable du secrétariat de l'Initiative Multilatérale sur le paludisme.
Il faudra plus qu'un vaccin pour vaincre le paludisme
Si les résultats du vaccin R21 suscitent de l'espoir, il faudra sans doute plus que cette piqûre pour en finir avec cette maladie transmissible à l'homme par les piqûres de moustiques infectés. Pour la Professeur Ntoumi, "il sera difficile d’avoir un vaccin avec une efficacité suffisante pour résoudre le problème du paludisme à lui seul".
Celle qui dirige aussi la Fondation congolaise pour la recherche médicale à Brazzaville estime que les outils de lutte contre le paludisme mis à notre disposition "sont mal ou peu utilisés". Avant d'ajouter que "les médicaments vendus dans la rue, peu contrôlés et souvent inefficaces, sont un obstacle à la lutte contre le paludisme".