"L'boufa" fait tousser le plan antidrogue au Maroc
Que ce soit à Casablanca ou à Rabat, nombreux sont les jeunes accros à "l'boufa". Mais c'est quoi cette drogue ?
Apparue il y a quelques années au Maroc, "L’pouffa" ou "l'Boufa", appellations locales d'une sorte de crack, fait des ravages. Connu comme "drogue du pauvre", la pouffa est un dérivé bon marché de la cocaïne. La poudre blanche est diluée avec du bicarbonate de soude ou de l'ammoniaque. Un gramme de "bouffa" serait commercialisé aux alentours de 40/50 Dhs au Maroc. Ses effets sont plus puissants mais plus éphémères que ceux de la cocaïne, ce qui pousse les usagers à multiplier les prises.
Hautement addictive, cette drogue de synthèse est vendue sous forme de caillou ou de galette et inhalée grâce à une pipe à crack ou tout autre accessoire pouvant permettre de l'inhaler. "Lorsqu’un jeune devient accro, il se met à avoir des frissons [en cas de crise de manque, Ndlr]. Nous avons reçu plusieurs cas dans cet état, ici, au centre. Une fois qu’il a ces frissons, s’il ne consomme pas [de nouveau] cette drogue, il peut commettre l’irréparable", expliquait récemment Abdelmajid Qadiri, président de l’ONG marocaine "Non aux psychotropes", à nos confrères du média Le360.
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Les effets recherchés
Le crack est un stimulant qui produit un effet énergisant et diminue les sensations de fatigue. Elle procure une exaltation de l'humeur, un sentiment de toute puissance intellectuelle et physique, une indifférence à la fatigue et à la douleur, une aisance pour communiquer avec les autres ou encore une stimulation du désir sexuel. Ses effets sont puissants et disparaissent assez rapidement. "Si on la fume, ils viennent très vite et durent 5 à 10 minutes", explique indique Laurent Karila, psychiatre et addictologue. Une fois que les sensations recherchées ont disparu, la personne peut se sentir anxieuse et déprimée et ressentir un besoin intense d'en reprendre.
Les effets secondaires
La phase de "descente" se traduit par une sensation de fatigue, d'abattement, et d'"inversion de l'humeur" : l'état dépressif succède à la stimulation, l'anxiété et l'irritabilité à la confiance en soi et à l'euphorie. Pour l'éviter, certains consommateurs n'hésitent pas à prendre des médicaments anxiolytiques ou de l'alcool, renforçant ainsi le risque de polyconsommation et de dépendance à d'autres produits.
Lors d'un usage occasionnel ou à faible dose, les effets secondaires les plus fréquents sont une diminution de l'appétit et de la soif, de la fatigue, des insomnies, un langage précipité, une mauvaise coordination des mouvements, des sautes d'humeur, de l'anxiété...
Lors d'un usage répété ou à forte dose, d'autres effets s'ajoutent : tremblements, fièvre, confusion mentale, délire, crise d'angoisse intense, idées paranoïaques, mégalomanie, illusions sensorielles multiples, troubles de l'érection...
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Une lutte compliquée
Certes, l'pouffa gagne du terrain au Maroc, alors que le marché de la drogue commence à se digitaliser au royaume. Pourtant, il ne faudrait pas croire que les autorités restent inactives. Ces trois dernières années, 200 affaires liées à cette drogue ont été traitées par la justice marocaine. Selon le ministère de l'Intérieur, ces dossiers ont entraîné la saisie d’environ 3 Kg de ce dérivé low-cost de la cocaïne et l'interpellation de 282 personnes.
Au cours de l'année scolaire 2022/2023, les opérations sécuritaires menées aux alentours des établissements d’enseignement ont conduit au traitement de 3.870 affaires, entraînant l’interpellation de 4.286 suspects, selon des chiffres officiels. Mais malgré l'évolution significative des saisies et du nombre d'affaires traitées, les autorités ont encore beaucoup à faire pour éradiquer ce fléau.